20

Elle était debout dans la cuisine sombre, l’estomac délicieusement plein. Plus une goutte de lait, plus une miette de fromage, plus une lichette de beurre. C’était ce qu’on pouvait appeler un nettoyage par le vide. Oh, quelques lamelles de fromage jaune lui avaient échappé ! Vite ! Et hop ! Plus de fromage jaune.

— Tu sais, ma chérie, si je m’étais aperçue que tu étais débile…

C’était parfaitement impossible, maman, je suis toi et je suis Michael. Et je suis tous ceux à qui tu as parlé depuis le début, et je suis Mary Jane.

Mona éclata de rire, seule dans la cuisine noire, appuyée contre le réfrigérateur. Et la crème glacée ? Merde ! Elle avait failli oublier. De la Häagen-Dazs à la vanille ! Des pots entiers !

— Mona !

Qui était-ce ? Eugenia ? La barbe ! Je n’ai pas envie de lui parler. Je ne veux pas qu’elle nous dérange, Mary Jane et moi.

Mary Jane était toujours dans la bibliothèque avec les papiers qu’elle avait volés dans le bureau de Michael. Ou alors ceux de Rowan ? Bref, c’était de la paperasse médicale et juridique et des documents sur ce qui s’était passé trois semaines plus tôt. Une fois plongée dans les différents dossiers, Mary Jane s’était montrée insatiable. L’histoire de la famille la passionnait.

— Maintenant, la question est de savoir si on laisse de la glace à Mary Jane, par esprit de famille, ou si on se tape tout.

On se tape tout.

Le moment était venu de parler à Mary Jane. Quand elle avait passé la porte, quelques minutes plus tôt, avant le raid final sur la cuisine, Mary Jane avait marmonné des trucs sur les médecins morts, le Dr Larkin et l’autre, de Californie, et sur les autopsies des femmes de la famille. Le tout était de ne pas oublier de tout remettre à sa place pour que ni Rowan ni Michael ne s’aperçoivent de quelque chose.

— Mona ! Mona Mayfair !

Eugenia l’appelait.

— Mona, c’est Mme Rowan au téléphone ! Elle appelle d’Angleterre !

Zut et zut ! Il lui manquait juste une cuillère pour manger sa glace. Ce pot était presque vide mais il y en avait plein d’autres.

Bon, qui accourait maintenant à petits pas dans l’obscurité ? Morrigan claquait sa petite langue en rythme avec les petits pas.

— Ah ! voilà ma tendre cousine Mary Jane Mayfair.

— Chut ! dit la jeune fille en mettant un doigt sur sa bouche. Elle te cherche. Rowan est au téléphone. Elle veut te parler. Elle a demandé à Eugenia de nous réveiller toutes les deux.

— Décroche le téléphone dans la bibliothèque et prends le message. Je ne veux pas prendre le risque de lui parler. Dis-lui que je vais bien, que je suis dans mon bain, ou ce que tu veux, et prends des nouvelles de tout le monde. Demande comment va Yuri.

— D’accord.

Elle repartit.

Mona racla ce qui restait de la glace et lança le pot vide dans l’évier. Quel foutoir dans cette cuisine ! Toute ma vie, j’ai été bien ordonnée et, maintenant, je suis corrompue par l’argent. Elle arracha l’opercule d’un autre pot de glace.

Les petits pieds magiques revenaient. Mary Jane fit irruption dans l’office et passa la porte en courant. Avec ses cheveux couleur maïs, ses longues jambes dorées, sa taille fine et sa robe blanche, elle était ravissante.

— Mona ! chuchota-t-elle.

— Ouais. Quoi encore ?

— Rowan a dit qu’elle avait des nouvelles capitales pour nous. Elle nous racontera tout à son retour mais elle a encore quelque chose à faire. Pareil pour Michael. Et Yuri va bien.

— Tu t’es bien débrouillée. Et pour les gardes, dehors ?

— Elle a dit de ne rien changer. Elle a déjà appelé Ryan pour le prévenir. Il faut que tu restes à l’intérieur, que tu te reposes et que tu obéisses au médecin.

— Quelle femme pratique et intelligente !

Le second pot était déjà vide. Bon, ça suffit. Elle commençait à frissonner de froid. Elle aurait dû se débarrasser des gardes.

Mary Jane posa une main sur son bras.

— Ça va ?

Les yeux de Mary Jane tombèrent sur le ventre de Mona et son visage devint livide. Elle baissa la main droite pour toucher le ventre mais n’osa pas.

— Écoute, c’est le moment de tout te dire, dit Mona. Tu vas avoir un choix à faire. Je voulais y aller progressivement, mais ce n’est pas nécessaire. Je peux faire ce que j’ai à faire même sans ton aide. D’ailleurs, je ferais mieux de ne pas te mêler à ça. Bon. Soit nous partons d’ici et tu m’aides, soit je pars seule.

— Pour aller où ?

— Justement. D’abord, on fiche le camp, gardes ou non. Tu sais conduire, hein ?

Elle passa devant Mary Jane, entra dans l’office et ouvrit un placard. Les clés de la Lincoln… La limousine était bien une Lincoln ? Quand Ryan la lui avait achetée, il avait précisé qu’elle ne devrait jamais monter dans une limousine autre qu’une Lincoln noire. Ah ! les clés. Michael avait emporté les siennes et celles de la Mercedes. Les clés de la limousine étaient bien là où Clem, était tenu de les ranger.

— Évidemment que je sais conduire, dit Mary Jane. Mais on prend la voiture de qui ?

— La mienne. La limousine. Mais sans le chauffeur. Tu es prête ? Je pense que le chauffeur dort. Bon, qu’est-ce qu’il nous faut ?

— Je te rappelle que t’es censée tout m’expliquer pour que je prenne ma décision.

Mona s’arrêta. La maison était plongée dans l’obscurité. Seule la lumière de la piscine projetait par endroits un halo bleu.

— Et si c’était toi qui me racontais ? dit Mona.

— D’accord. Tu veux ton bébé, quel qu’il soit.

— Exact.

— Et tu laisseras pas Rowan et Michael le tuer, quel qu’il soit.

— Exact.

— Et le meilleur endroit où on pourrait aller c’est celui où personne ira nous chercher.

— Exact.

— Le seul endroit possible est Fontevrault. Si on coupe les amarres de toutes les embarcations du ponton, ils seront obligés d’amener un bateau pour traverser le marais. À condition qu’ils aient l’idée qu’on est là-bas, évidemment.

— Mary Jane, tu es un génie !

Je t’aime, maman.

Je t’aime aussi, ma petite Monigan. Aie confiance en moi. Aie confiance en Mary Jane.

— Hé ! Tu vas pas t’évanouir dans mes bras ! s’écria Mary Jane. Attends ! Je vais chercher des oreillers, des couvertures et tout ça. T’as de l’argent ?

— Des tas de billets de vingt dollars dans le tiroir de ma table de chevet.

— Il faut t’asseoir. Viens avec moi.

Mary Jane emmena Mona dans la cuisine et la fit asseoir.

— Pose ta tête sur la table.

— Mary Jane, arrête ! Tu me fiches la trouille !

— Repose-toi jusqu’à ce que je revienne.

Le bruit de talons s’éloigna.

La chanson sur les fleurs et la lande reprit doucement.

Arrête, Morrigan !

Parle-moi, maman. Oncle Julien t’a amenée ici pour coucher avec mon père mais il ne savait pas ce qui arriverait. Tu sais, maman, tu as dit que tu comprenais, que l’hélice géante, dans ce cas, ne s’alliait pas à un méchant du passé mais n’était qu’une expression d’un potentiel génétique qui avait toujours été en toi et en papa…

Mona essaya de répondre, mais ce n’était pas nécessaire. La petite voix continuait de chantonner, à une cadence de plus en plus rapide.

Hé, ralentis ! On dirait un bourdon quand tu fais ça.

… immense responsabilité de survivre et d’enfanter et de m’aimer. N’oublie pas de m’aimer, mère, j’ai besoin de toi. J’ai besoin de ton amour, avant toute chose. Sinon, je risque de perdre ma volonté de vivre.

Tout le monde s’était réuni en tremblant et en criant dans le cercle de pierre et le grand aux cheveux sombres arrivait pour les calmer. Ils se rapprochèrent du feu.

— Mais pourquoi ? Pourquoi veulent-ils nous tuer ?

Et Ashlar dit : « C’est leur façon d’agir. Ces guerriers tuent tous ceux qui n’appartiennent pas à leur clan. C’est aussi important pour eux que manger ou boire ou nous faire l’amour. Ils se repaissent de la mort. »

— Écoute, dit-elle tout haut.

La porte de la cuisine venait de claquer. Du calme, Mary Jane. Tu vas alerter Eugenia. Nous devrions adopter une attitude scientifique. J’aurais dû enregistrer tout ça dans l’ordinateur. Quand nous serons à Fontevrault, je pourrai utiliser celui de Mary Jane. Mary Jane, l’envoyée de Dieu.

Mary Jane revint et, cette fois, ferma doucement la porte de la cuisine.

— Voilà ce que les autres doivent comprendre, dit Mona. Que cela ne vient pas de l’enfer mais de Dieu. Sur le plan métaphysique ou métaphorique, Lasher était un suppôt de Satan. Mais lorsqu’un être naît de cette façon, de deux humains possédant un génome mystérieux, alors, c’est une créature de Dieu. Que serait-ce d’autre ? Emaleth était le fruit d’un viol. Pas Morrigan. En tout cas, ce n’est pas la mère qui a été violée !

— Chut ! Partons d’ici. J’ai dit aux gardes que j’avais vu quelque chose de bizarre devant et que je prenais la voiture pour passer prendre des vêtements chez toi pour aller chez le médecin. Allez, viens !

— Mary Jane, tu es un petit génie.

Elle se leva et tout se mit à tanguer autour d’elle.

— Doux Jésus ! laissa-t-elle échapper.

— Je suis là, tiens-toi à moi. T’as mal ?

— Non, c’est juste comme s’il y avait eu une explosion nucléaire dans mon ventre. Filons d’ici !

Elles sortirent dans l’allée à pas feutrés. Mary Jane soutenant Mona. Mais elle se débrouilla bien jusqu’au garage. La limousine noire attendait, moteur en marche et portière ouverte.

— Morrigan, arrête de chanter ! Il faut que je réfléchisse. Pour ouvrir la porte, il faut appuyer sur le bouton magique, Mary Jane.

— Je sais. Monte.

La porte s’ouvrit et le moteur rugit.

— Tu sais, Mona. J’ai une question à te poser. Il le faut. Et si ce bébé pouvait pas naître sans que toi tu meures ?

— Tiens ta langue, cousine ! Rowan n’est pas morte. Je ne vais pas mourir. Morrigan ne me laisserait pas faire.

Non, mère, je t’aime. J’ai besoin de toi. Ne parle pas de mourir. Quand tu parles de la mort, je sens la mort.

— Chut ! Mary Jane, tu es sûre que Fontevrault est le meilleur endroit ? On n’a pas pensé à d’autres possibilités. Peut-être qu’un motel…

— Écoute, y a Granny là-bas. On peut lui faire totalement confiance. Et le gamin qui s’occupe d’elle éjectera dès que je lui aurai donné un de tes billets de vingt dollars.

— Mais s’il laisse son bateau au ponton…

— Non, t’inquiète pas. Il remonte avec sa pirogue jusqu’à l’endroit où il habite. Il passe pas par le ponton. Assieds-toi confortablement et repose-toi. On a tout ce qu’il faut à Fontevrault. Et le grenier est sec et chaud.

— Ce sera parfait.

— Et quand le soleil se lève, le matin, il entre par les fenêtres du grenier et…

Mary Jane freina brusquement. Elles étaient déjà sur Jackson Avenue.

— Désolée, chérie, cette voiture est vraiment très puissante.

— Tu as du mal à la conduire ? Tu sais, je ne m’étais encore jamais assise à l’avant. On a l’impression de piloter un avion.

— Non, j’ai pas de mal à la conduire.

Elle s’engagea dans St. Charles.

— Mais c’est pas commode avec tous ces conducteurs bourrés, précisa-t-elle. Il est minuit, tu sais. Cette voiture est une vraie pantoufle pour quelqu’un qui a déjà conduit un dix-huit roues.

— Et où diable as-tu fait ça ?

— En Arizona, mon ange. Il fallait absolument que je vole ce camion. Mais c’est une autre histoire.

Morrigan l’appelait. Elle avait recommencé à chantonner. Peut-être pour elle-même.

Je suis impatiente de te voir, de te tenir dans mes bras.

Sachant ce que tu es, je ne t’en aime que davantage. C’est le destin, Morrigan. Il éclipse tout le reste, le monde des berceaux en osier, des hochets et des pères heureux. Mais il sera heureux lorsqu’il aura compris que les conditions sont tout autres…

Le monde tournoyait. Le vent froid balayait la plaine. Mais ils dansaient tout de même, pour vaincre le froid. Pourquoi n’y avait-il plus de chaleur ? Où était leur patrie ?

Ashlar dit : « Notre nouvelle patrie est ici désormais. Nous devons apprendre le froid comme nous avons appris la chaleur. »

Ne les laisse pas me tuer, maman.

Morrigan était à l’étroit dans le liquide, entourée de ses cheveux, ses genoux pressés contre ses yeux.

— Mon bébé, pourquoi crois-tu qu’ils te veulent du mal ?

Je le crois parce que tu le crois, maman. Je sais ce que tu sais.

— Tu parles au bébé ? demanda Mary Jane.

— Oui, et elle me répond.

Quand elles atteignirent l’autoroute, les yeux de Mona se fermaient tout seuls.

— Dors, maintenant, lui conseilla Mary Jane. On va avaler des kilomètres. Cet engin monte à cent trente sans même qu’on s’en aperçoive.

— N’attrape pas un PV.

— Dis donc ! Tu crois qu’une sorcière comme moi laisserait un policier finir de rédiger son PV ?

Mona se mit à rire. Tout allait pour le mieux.

Et le meilleur restait à venir.

 

Taltos
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